Mieux comprendre le mouvement pour remporter une grande victoire

13 août 2024

Eve Charbonneau, doctorante à l’UdeM, explique comment ses recherches pratiques en biomécanique ont aidé l’athlète canadienne Sophiane Méthot à gagner une médaille de bronze aux Jeux de Paris.

Au début du mois d’août, en regardant la trampoliniste canadienne Sophiane Méthot rebondir et virevolter pour obtenir une médaille de bronze aux Jeux olympiques de Paris, Eve Charbonneau a su qu’elle avait bien mené ses recherches.

Étudiante au doctorat en génie biomédical à l’Université de Montréal, la chercheuse a travaillé pendant des années avec Sophiane Méthot et d’autres athlètes de Gymnastique Canada pour optimiser leur technique sur le trampoline.

Financée par l’organisme national d’innovation sans but lucratif Mitacs et par À nous le podium, Eve Charbonneau a soumis les athlètes à une série de tests à l’aide de capteurs corporels, construisant des modèles informatiques en 3D de leurs acrobaties dans les airs afin qu’ils puissent apprendre où s’améliorer.

Cela a porté ses fruits le 2 août à l’aréna de Bercy, à Paris, lorsque, à la veille de son 26e anniversaire, Sophiane Méthot, originaire de Varennes, a réussi sa performance en finale, devenant ainsi la huitième Canadienne à remporter une médaille olympique en trampoline depuis l’inclusion de ce sport, aux Jeux de Sydney en 2000.

Le travail acharné a également porté ses fruits pour Eve Charbonneau: quelques jours seulement avant la victoire de Sophiane Méthot, elle a soumis une thèse de 323 pages intégrant ses recherches sur les acrobaties au trampoline en vue de l’obtention d’un doctorat en génie biomédical.

Nous lui avons demandé de nous parler de la science novatrice qui a mené au succès olympique.

Tout d’abord, qu’est-ce qui vous a amenée à vous intéresser à la biomécanique? Avez-vous vous-même pratiqué le trampoline?

Oui, j’ai pratiqué le trampoline pendant près de 10 ans. Je m’entraînais d’ailleurs à l’époque avec Sophiane. Le trampoline est un sport très technique où plusieurs facteurs doivent être pris en compte pour déterminer la meilleure technique à utiliser. J’ai donc commencé à m’intéresser à la biomécanique alors que j’étais encore athlète. J’avais besoin de bien comprendre l’acrobatie avant de m’élancer. La transition vers la recherche en biomécanique s’est faite naturellement, cela m’a permis d’allier deux de mes passions: la physique et le trampoline.

Comment avez-vous procédé pour travailler avec Sophiane Méthot et les autres athlètes?

J’ai travaillé avec les athlètes de l’équipe canadienne de trampoline tout au long de ce cycle olympique en tant que biomécanicienne. Mon rôle n’est pas de les entraîner, mais plutôt de les aider à corriger des défauts récurrents. À leur niveau de pratique du sport, les athlètes ont généralement un assez bon contrôle de leur corps pour apporter des modifications à leurs mouvements. Lorsqu’ils n’y arrivent pas, c’est souvent parce que les mouvements qu’ils essaient de modifier ont une utilité d’un point de vue biomécanique, comme leur permettre de tourner plus vite. Ma tâche est de trouver une autre façon d’arriver au même résultat acrobatique sans que ce soit pénalisé par les juges. Disons, par exemple, que Sophiane a un bras décollé au milieu de son mouvement, ce qui entraîne une déduction de 0,1 point, je pourrais lui conseiller de vriller en faisant un mouvement plus ample avec ses jambes.

 

Comment les athlètes ont-ils réagi à vos interventions?

J’ai été super chanceuse: les athlètes m’ont fait confiance même si mes propositions de techniques sont à l’occasion différentes de ce qu’ils sont habitués d’entendre. Parfois, je vois sur leur visage qu’ils trouvent que mes idées sont drôles, mais en discutant on arrive toujours à trouver une solution qui fonctionne et qu’ils sont à l’aise d’essayer. C’est très satisfaisant quand j’arrive à les aider à corriger un défaut sur lequel ils travaillent depuis longtemps sans succès. Ils sont généralement très reconnaissants.

Qu’est-ce qui vous a traversé l’esprit lorsque vous avez vu Sophiane Méthot exécuter l’exercice qui lui a valu la médaille de bronze?

Sur le coup, j’analysais chacun des détails techniques sur lesquels on a travaillé. Puis lorsqu’on a su qu’elle remportait le bronze, j’ai été tellement contente pour elle! Ça fait des années qu’elle s’entraîne pour ça et elle le mérite amplement.

Vous venez de soumettre votre thèse de doctorat. Cela doit être un grand soulagement!

Oui, c’est une grande étape de passée. Mais je suis passionnée par la recherche et j’ai déjà d’autres projets en cours.

De nouvelles recherches?

Oui, je vais entreprendre un postdoctorat. Mais avant de partir, dans les prochains mois, je vais rencontrer les entraîneurs et les autres biomécaniciens canadiens pour leur transmettre les résultats de mes recherches doctorales. J’aimerais transmettre le plus possible l’expertise que j’ai acquise en acrobaties aériennes pour aider nos athlètes d’autres sports comme le plongeon, la gymnastique et le ski acrobatique.

Source : UdeMNouvelles, 12 août 2024