Des séances quotidiennes de froid intense pourraient améliorer la qualité du sommeil

18 novembre 2024

Des séances de cryostimulation, réalisées dans une chambre refroidie à -90 °C, pourraient permettre d’améliorer la qualité du sommeil, selon une étude réalisée par Olivier Dupuy, de l’UdeM.

es séances quotidiennes de cryostimulation du corps entier permettraient d’améliorer la qualité du sommeil – et d’agir sur l’humeur – chez de jeunes adultes en bonne santé.

C’est ce qu’indiquent les résultats d’un projet de recherche dont les résultats ont été publiés dans la revue Cryobiology sous la plume d’Olivier Dupuy, professeur associé à l’École de kinésiologie et des sciences de l’activité physique de l’Université de Montréal.

Une expérience rigoureusement froide!

«L’utilisation du froid à des fins thérapeutiques remonte à la Grèce antique, mais on n’a pas encore établi avec précision la dose de froid nécessaire pour obtenir des bienfaits sur le sommeil», explique Olivier Dupuy pour justifier le projet de recherche qu’il a mené avec Laurent Bosquet et Benoit Dugué, deux collègues de l’Université de Poitiers.

L’équipe a ainsi recruté 20 personnes en bonne santé – 9 femmes et 11 hommes – âgées en moyenne de 23 ans qui ont pris part à une séance quotidienne de cryostimulation pendant cinq jours consécutifs.

Chaque séance consistait en une exposition au froid de cinq minutes dans une chambre de cryostimulation refroidie à -90 °C. «Tous portaient des sous-vêtements ou un maillot de bain, des chaussettes, des chaussures de type Crocs, des mitaines et une tuque pour protéger leurs extrémités du froid intense», précise le chercheur.

Par la suite, les participants vaquaient à leurs occupations habituelles jusqu’à l’heure du coucher en évitant toutefois de boire de l’alcool ou de s’adonner à toute activité physique ou autre pouvant influencer leur sommeil.

Au moment d’aller au lit, on leur installait un bandeau sans fil équipé de capteurs d’activité cérébrale, un actimètre au poignet et un moniteur de fréquence cardiaque afin de mesurer l’effet de la cryostimulation sur leur physiologie durant la nuit. Le matin venu, ils remplissaient un questionnaire sur la qualité perçue de leur sommeil.

Pour isoler l’effet de la cryostimulation sur le sommeil, l’équipe de recherche a également recueilli des données sur les sujets de l’étude pendant cinq autres jours consécutifs, sans séances de froid.

De trois à quatre nuits nécessaires

Les données révèlent qu’une seule séance de cryostimulation ne suffit pas à améliorer le sommeil: les bienfaits apparaissent après cinq séances consécutives.

L’analyse de l’architecture du sommeil a montré une augmentation significative de la durée du sommeil à ondes lentes pendant les nuits suivant l’exposition à la cryostimulation, comparativement aux nuits non précédées de séances de froid. Le sommeil à ondes lentes, considéré comme la phase la plus réparatrice du sommeil, s’est accru en moyenne de 7,3 minutes lors des deux premiers cycles du sommeil.

L’étude a également mis en évidence des différences marquées entre les sexes. Les femmes ont particulièrement bénéficié de la cryostimulation, rapportant une amélioration perçue de leur sommeil lors des troisième et quatrième nuits du protocole: sur une échelle de 1 à 5, leur score est passé de 3,4 sans cryostimulation en moyenne à 3,9 avec cryostimulation. Leur niveau d’anxiété perçu, évalué sur une autre échelle, a quant à lui diminué de 43 à 38 points.

«Les femmes n’ont pas la même réponse que les hommes, ce qui laisse entendre que la dose de froid devrait être adaptée selon le sexe, mais c’est un aspect qui reste à explorer», note l’auteur de l’étude.

Selon lui, bien que les changements observés puissent sembler modestes, ils pavent la voie à des applications potentielles.

De possibles applications

«Puisque notre étude porte sur des gens qui dorment bien en général, nous croyons que la cryostimulation pourrait être encore plus bénéfique pour les personnes qui ont des problèmes de sommeil», avance Olivier Dupuy.

Aussi estime-t-il que ces résultats laissent présager différentes perspectives d’application. «Pour les athlètes de haut niveau, cela pourrait améliorer la récupération, tandis que pour la population générale la cryostimulation pourrait aider les personnes qui souffrent d’inflammation chronique, ou même celles atteintes de démence légère, en combinaison avec de l’exercice physique», illustre le chercheur.

À cet égard, cette recherche s’inscrivait dans un projet plus large: Olivier Dupuy et ses collègues ont obtenu un financement pour étudier la préparation d’athlètes en vue des Jeux olympiques de Paris et deux autres articles scientifiques sur le lien entre le froid et le sommeil seront prochainement publiés.

Néanmoins, plusieurs questions sont encore à approfondir, notamment les effets à long terme de la cryostimulation et sa portée clinique précise. «Une chose est certaine, il ne s’agit pas d’un effet placébo, assure-t-il. D’autres études indiquent que des bienfaits similaires ont déjà été observés chez des athlètes de haut niveau», dit Olivier Dupuy.

Dans certains pays, comme la Pologne, des séances de cryostimulation sont remboursées par la sécurité sociale. «Avec ces nouvelles données encourageantes, cette approche thérapeutique pourrait bien trouver sa place dans les milieux cliniques, en médecine, en kinésiologie et en physiothérapie», conclut-il.

Source : UdeMNouvelles, 12 novembre 2024