Une nouvelle étude démontre que les survivants d’un cancer pédiatrique devraient subir un test d’effort pour détecter le syndrome du QT long acquis, un type d’arythmie cardiaque.
Quel est le lien entre les traitements contre un cancer pédiatrique et le développement d’arythmies cardiaques? Une nouvelle étude apporte des données importantes sur ces complications à long terme et souvent non diagnostiquées de la chimiothérapie pour le traitement de la leucémie lymphoblastique aigüe (LLA), le plus commun des cancers pédiatriques.
À l’occasion de la Journée internationale du cancer de l’enfant et en plein Mois du cœur, zoom sur les résultats de cette recherche collaborative!
Des complications «silencieuses»
Bien que le taux de survie des enfants atteints d’une LLA ait considérablement augmenté grâce aux progrès médicaux et atteigne maintenant près de 85 %, un grand nombre de jeunes survivants développent des problèmes de santé à la suite de la chimiothérapie, notamment des complications cardiovasculaires.
L’une de ces complications est le syndrome du QT long acquis, un type d’arythmie cardiaque causé par une anomalie électrique. Ce syndrome, qui n’est pas visible lorsqu’on regarde la structure du cœur, peut néanmoins entraîner des battements rapides et chaotiques qui sont déclenchés par l’exercice ou le stress. Le syndrome du QT long acquis peut parfois provoquer des évanouissements soudains ou des convulsions et augmente le risque que surviennent des troubles potentiellement mortels comme un arrêt cardiaque.
Dans cette étude, on a ainsi demandé à près de 200 individus ayant survécu à une LLA dans l’enfance de passer des tests d’effort sur un tapis roulant. Résultat: 70 % des personnes ayant un QT anormal durant l’exercice ne présentaient aucune anomalie au repos. En d’autres termes, un nombre significatif de personnes étaient sans le savoir à risque de complications cardiaques. De plus, chez 10 % d’entre elles, on a diagnostiqué un «QT long», une forme grave du syndrome.
«La chimiothérapie entraîne des changements dans les cellules myocardiques, explique la Dre Cecilia Gonzalez Corcia, professeure au Département de pédiatrie de l’Université de Montréal et cardiologue-chercheuse au Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine. Ces modifications qui ne s’expriment pas toujours au repos peuvent néanmoins entraîner des anomalies lorsque le muscle cardiaque est mis sous tension, par exemple lors d’une activité physique intense.»
Cette étude est la première à désigner et à caractériser des survivants de la LLA pédiatrique présentant un allongement anormal de l’intervalle QT lors d’un test d’effort maximal.
«Nos résultats mettent en lumière l’importance d’inclure des tests d’effort dans le suivi en clinique des survivants d’un cancer pédiatrique, en particulier un test d’effort cardiopulmonaire standardisé, qui serait réalisé en plus de l’échocardiographie et de l’électrocardiogramme», précise Audrey Harvey, première auteure de l’étude et doctorante à l’Université de Montréal.
L’étude souligne aussi le besoin de suivis médicaux réguliers, en particulier pour les survivants ayant reçu de plus hautes doses de chimiothérapie ou sur une plus longue période, ou encore pour ceux qui souhaitent pratiquer un sport après leur rémission. Bien que ces tests ne fassent pas encore partie des recommandations officielles, l’étude souhaite contribuer à un consensus de spécialistes sur la question afin de prévenir l’apparition de troubles cardiaques, d’en améliorer le diagnostic et d’assurer ainsi une meilleure santé et une meilleure qualité de vie aux jeunes survivants d’un cancer.
À propos de cette étude
L’article «Uncovering possible silent acquired long QT syndrome using exercise stress testing in long-term pediatric acute lymphoblastic leukemia survivors», par Audrey Harvey et ses collègues, est publié dans l’International Journal of Cancer.
La recherche a bénéficié d’un soutien financier de l’Institut de recherche sur le cancer des Instituts de recherche en santé du Canada, en collaboration avec le Conseil C17, la Société canadienne du cancer, la Société de recherche sur le cancer, le Garron Family Cancer Centre à l’Hôpital pour enfants malades de Toronto, l’Ontario Institute for Cancer Research et le Pediatric Oncology Group of Ontario. La recherche a aussi été en partie financée par des subventions de la Fondation Cole, du Fonds de recherche du Québec – secteur Santé, de la Fondation CHU Sainte-Justine et de la Fondation des étoiles. Elle a enfin été appuyée par une bourse postdoctorale de l’Institut TransMedTech.
Source : UdeMNouvelles, 13 février 2025